Le nom de domaine : un choix stratégique

Consultant et formateur secteur non marchand

Le nom de domaine permet l’identification du site Internet exploité par une entité. Comment définir son nom et quelles sont les étapes à respecter avant de le déposer ?

Le nom de domaine (DD en notation abrégée française ou DN pour Domain Name en anglais) est un choix fondamental et stratégique pour toute structure qui souhaite s’engager dans l’aventure du e-commerce. Le nom de domaine associe deux éléments : une dénomination ainsi qu’une zone d’activité (.com ; .org ; .net ; etc.) ou géographique (.fr ; .de ; etc.). Il faut prendre le temps de bien choisir son nom de domaine, car c’est lui qui représentera l’entité sur Internet. Voici les questions à se poser : comment choisir son nom de domaine ; comment enregistrer son nom de domaine ; qu’est-ce que le respect des droits antérieurs ; quid des litiges ?

Comment choisir son nom de domaine ?

L’Afnic (Association française pour le nommage Internet en coopération), qui est le gestionnaire historique des noms de domaine en .fr, donne quelques recommandations aux porteurs de projets qui envisagent de choisir un nom de domaine. Tout en rappelant la règle du « premier arrivé, premier servi », l’Afnic indique qu’un nom de domaine doit être court et mémorisable ; que les caractères doivent être lisibles (un tiret ou un accent peuvent améliorer la lisibilité) ; qu’il faut évaluez l’intérêt d’y mettre des mots-clés pour apporter une information utile sur l’activité ou la localisation, par exemple ; qu’il est indispensable de tester plusieurs propositions auprès de son entourage pour choisir celle qui correspond le mieux au projet ; enregistrer quelques variantes orthographiques pour parer aux éventuelles erreurs de saisie ou éviter que quelqu’un d’autre enregistre un nom de domaine trop proche.

Les noms de domaine sont attribués et gérés dans l’intérêt général selon des règles non discriminatoires et transparentes, garantissant le respect de la liberté de communication, de la liberté d’entreprendre et des droits de propriété intellectuelle. En application des dispositions du Code des postes et des communications électroniques et de la convention conclue avec l’État, l’Afnic a édité une charte de nommage. Elle définit les conditions d’attribution et de gestion des noms de domaine gérés par cet organisme, à savoir : .fr (France métropolitaine et Corse), .re (La Réunion), .yt (Mayotte), .pm (Saint-Pierre-et-Miquelon), .wf (Wallis-et-Futuna), .tf (Terres australes et antarctiques françaises).

L’Afnic élabore et tient à jour une liste des noms de domaine dont l’enregistrement est soumis à un examen préalable. Pour procéder à l’enregistrement de l’un de ces termes, les demandes doivent être adressées au bureau d’enregistrement, et le demandeur doit s’assurer que le nom de domaine n’est pas susceptible de porter atteinte à l’ordre public ou aux bonnes mœurs ou à des droits garantis par la Constitution ou la loi. Cette liste de noms est non exhaustive, dans la mesure où le seul fait de publier certains d’entre eux pourrait heurter la sensibilité du public, et évolutive.

Qu’est-ce que le respect des droits antérieurs ?

Comme indiqué précédemment, le Code des postes et des communications électroniques encadre juridiquement les modalités de réservation d’un nom de domaine. Les articles L 45 et suivants disposent que les noms de domaine sont attribués et gérés dans l’intérêt général selon des règles non discriminatoires et transparentes, garantissant le respect de la liberté de communication, de la liberté d’entreprendre et des droits de propriété intellectuelle. Les noms de domaine sont attribués pour une durée limitée et renouvelable. Le nom de domaine est attribué au demandeur éligible ayant le premier fait régulièrement parvenir sa demande. Un nom de domaine attribué et en cours de validité ne peut faire l’objet d’une nouvelle demande d’enregistrement. L’enregistrement des noms de domaine s’effectue sur la base des déclarations faites par le demandeur et sous sa responsabilité.

L’enregistrement ou le renouvellement des noms de domaine peut être refusé, ou le nom de domaine supprimé lorsque le nom de domaine est : 

• susceptible de porter atteinte à l’ordre public ou aux bonnes mœurs ou à des droits garantis par la Constitution ou par la loi ;

• susceptible de porter atteinte à des droits de propriété intellectuelle ou de la personnalité, sauf si le demandeur justifie d’un intérêt légitime et agit de bonne foi ;

• identique ou apparenté à celui de la République française, d’une collectivité territoriale ou d’un groupement de collectivités territoriales ou d’une institution ou service public national ou local, sauf si le demandeur justifie d’un intérêt légitime et agit de bonne foi.

Le refus d’enregistrement ou de renouvellement ou la suppression du nom de domaine ne peuvent intervenir qu’après que l’office d’enregistrement a mis le demandeur en mesure de présenter ses observations et, le cas échéant, de régulariser sa situation.

La recherche d’antériorité consiste donc à vérifier que le nom de domaine ne se heurte à aucun droit antérieur détenu par des tiers. Elle s’effectue a minima sur le registre du commerce et des sociétés (qui sera prochainement remplacé par le registre national des entreprises) et sur le registre national des marques ; d’autres registres peuvent également être consultés comme le répertoire national des associations, par exemple. Ces recherches d’antériorité peuvent être effectuées par l’Inpi (Institut national de la propriété industrielle). Les tribunaux relèvent régulièrement les droits suivants : 

• une dénomination sociale en présence d’un risque de confusion dans l’esprit du public. Le risque de confusion s’apprécie au regard de l’activité réellement exercée par les parties en cause et pas limitativement au regard de l’objet social. Il suppose des activités identiques ou similaires ; 

• un nom commercial, qui, pour bénéficier du critère d’antériorité, doit être connu sur l’ensemble du territoire national ; il est également nécessaire de démontrer un risque de confusion dans l’esprit du public ; 

• un nom de domaine exploité de manière effective ; 

• une marque valablement enregistrée dont les produits et/ou les services tels que visés dans le dépôt de la marque sont identiques ou similaires à ceux proposés sur le site Internet en cause ;

• une marque de renommée. 

L’attribution d’un nom de domaine correspondant à la marque détenue par un tiers ou à tout autre signe distinctif d’une entreprise tierce expose le titulaire du nom de domaine litigieux à une action en contrefaçon et/ou en responsabilité civile pour concurrence déloyale ou parasitisme. Les tribunaux vont rechercher l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public sur l’origine du service offert à l’adresse du site incriminé et également examiner l’exploitation effective dudit site. 

Comment enregistrer son nom de domaine ?

Un nom de domaine ne s’achète pas, mais il se réserve potentiellement pour plusieurs années. Chaque nom de domaine ne peut être détenu que par une seule personne à la fois. Donc, pour réserver un nom de domaine, il faut qu’il soit disponible. Une simple requête sur les moteurs de recherche n’est pas suffisante pour déterminer si le nom de domaine est déjà utilisé et le recours au site Whois s’avère indispensable. Le Whois est l’outil indispensable permettant de : 

• tester immédiatement la disponibilité d’un nom de domaine ou de ses alternatives orthographiques ;

• connaître les informations utiles sur un nom déjà enregistré : titulaire, contact administratif et contact technique, bureau d’enregistrement, date d’expiration de l’enregistrement actuel et paramètres techniques associés (site web, serveurs de noms, etc.).

Le Whois de l’Afnic permet d’effectuer des recherches sur les noms de domaine se terminant par .fr ou .re ainsi que par .tf, .yt, .pm et .wf et d’accéder aux informations administratives et techniques suivantes : état (inactif ou actif), bureau d’enregistrement, dates de création et d’expiration, serveurs de noms (DNS), titulaire, contact administratif, contact technique. 

Pour enregistrer un nom de domaine, il faut s’adresser à l’un des nombreux prestataires agréés tels que Amen, Gandi, Mail Club, OVH, Ikoula, etc. Pour un site se terminant en .fr, c’est l’Afnic qui sera compétente. Le coût pour la réservation d’un nom de domaine est variable en fonction de l’extension choisie et d’éventuelles options souscrites comme la gestion d’une adresse e-mail professionnelle au nom de l’entreprise ou un service d’hébergement. 

S’agissant de l’Afnic, l’enregistrement s’effectue auprès de l’un de ses bureaux d’enregistrement présents en France et dans le monde. La plupart des bureaux d’enregistrement proposent un formulaire en ligne qui permet de fournir les informations nécessaires à la prise en charge de la demande. L’enregistrement d’un nom de domaine sous les extensions gérées par l’Afnic s’effectue, sous réserve de validité, 24 h/24 et 7 j/7, grâce à un service automatisé mis à la disposition des bureaux d’enregistrement par l’Afnic. Pour chaque demande, l’Afnic facture au bureau d’enregistrement une redevance. Ce dernier fixe librement ses tarifs, en fonction des services associés.

Quid des litiges ?

Le choix d’un nom de domaine peut être source de litiges. Ceux-ci peuvent être résolus par d’autres modes que l’action contentieuse devant les juridictions.  

Le CMAP (Centre de médiation et d’arbitrage de Paris) met à la disposition des usagers d’Internet, conformément à la Charte de nommage de l’Afnic, une procédure de règlement amiable des conflits relatifs aux noms de domaine : la « Recommandation en ligne des noms de domaine » gérés par l’Afnic, informatisée et sécurisée. Cette procédure consiste à obtenir d’un tiers indépendant, via aegiSolutions, une recommandation quant à la solution à donner à un litige relatif à un (ou plusieurs) nom(s) de domaine. La Recommandation en ligne est une procédure contradictoire, confidentielle et non contraignante. Elle peut être intégralement reprise par les parties sous la forme d’un protocole d’accord ou servir de base à de nouvelles discussions entre elles pour aboutir à un protocole d’accord. Toute Recommandation en ligne dont l’organisation est confiée au CMAP emporte l’adhésion des parties au règlement en vigueur au jour de la saisine du CMAP.

L’article L45-6 du Code des postes et des communications électroniques prévoit également une autre forme de résolution des litiges, s’agissant de la procédure Syreli, qui est peu coûteuse et rapide, mais elle n’a pas pour objet l’allocation de dommages et intérêts. Toute personne démontrant un intérêt à agir peut demander à l’office d’enregistrement compétent la suppression ou le transfert à son profit d’un nom de domaine. L’Afnic statue sur cette demande dans un délai de deux mois suivant sa réception, selon une procédure contradictoire fixée par son règlement intérieur, qui peut prévoir l’intervention d’un tiers choisi dans des conditions transparentes, non discriminatoires et rendues publiques. Le règlement intérieur fixe notamment les règles déontologiques applicables aux tiers et garantit le caractère impartial et contradictoire de leur intervention. Les décisions prises par l’office sont susceptibles de recours devant le juge judiciaire.

Enfin, il existe également la procédure dite « UDRP » (Uniform Domain Name Dispute Resolution Policy) qui est portée par l’OMPI (Organisation mondiale de la propriété  intellectuelle).  Cette procédure administrative n’est applicable qu’en ce qui concerne un litige relatif à une accusation d’enregistrement abusif d’un nom de domaine sur la base des critères suivants :

• le nom de domaine enregistré par le détenteur est identique ou semblable au point de prêter à confusion avec une marque de produits ou de services sur laquelle le requérant (la personne physique ou morale qui dépose la plainte) a des droits ; 

• le détenteur du nom de domaine n’a aucun droit sur le nom de domaine ni aucun intérêt légitime qui s’y attache ; 

• et le nom de domaine a été enregistré et est utilisé de mauvaise foi. 

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